...Nous avons à Rome deux compatriotes… Le premier est Mr. l’agent Zoëga qui est trop connu dans le monde litéraire pour ne pas meriter que notre Prince bien aimé s’occupe de son bonheur…
Le second compatriote duquel j’ai à Vous parler, Msgr., est le brave est digne Thorwaldsen, sculpteur fort habile, et qui commence à se faire une réputation comme artiste. Il avoit de notre Academie des beaux arts ce qu’on apelle un Stipendium de 400 rd. pendant six ans. Ce terme étant expiré, il devoit abandonner son art, et rester oisif au milieu d’une carriere vrayment brillante dans laquelle il avoit fait de pas rapides. Il devoit retourner dans sa patrie sans avoir atteint le but de ses études, tandis que son genie étonnant annonce qu’il peut devenir un des plus celebres artistes de son siècle. Si V.A.R. daignoit le favoriser en ordonnant qu’il fasse pour le nouveau Palais du Roi qu’on va rebatir, des ouvrages de sculpture, des statues ou des groupes et lui continuer le 400 rd. de gages, Elle conserveroit au Danemarc un de ses plus habiles artistes et deviendroit en meme temps le supreme bienfaiteur de cet homme interessant, et cela sans que la caisse du Roi en souffriroit, car le nouveau Château ne peut se passer d’ornements, et quel plus beau monument pourroit on exiger à la bienfaisance du Gouvernement Danois que d’immortaliser nos artistes, en plaçant leurs ouvrages dans les palais des nos Rois. L’architecte Hansen dont partout l’étranger j’entends faire l’eloge et qui connoit le merite de notre Thorwaldsen, seroit fait pour sugérer des idées capables d’enflamer son genie. Le Roi payeroit donc à notre celebre sculpteur non pas une pension, mais le salaire de ses ouvrages, desquels il s’engageroit à livrer une certaine quantité par an. C’est ainsi que V.A.R. pourroit encourager le talent d’un jeune homme auquel on assigne déjà à Rome la premiere place comme sculpteur après le celebre Canova que l’on regarde comme le premier, est je dois y ajouter qu’à l’avis des connoisseurs, si le premier est un peu secondé par son gouvernement et qu’il n’aye pas besoin de penser à sa subsistence journalière, il surpassera infailliblement le premier et deviendra par consequent le premier sculpteur de son siècle.
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