Monsieur
Depuis longtems je désire me rapeller a votre bon souvenir, mais jusqu’a présent aucune occasion ne s’est présenté a moi; je saisis celle de deux de mes compatriotes Monsieur de Rieding[?] et Monsieur le Comte d’Affry[?] qui désirent voir Rome et tout ce qu’elle contient de beau; comme vos ateliers sont en premiere ligne dans ce qu’on va y admirer, vous ne devez pas être étonné Monsieur, de la liberté que je prends de vous les recommander comme amateurs des arts et en état d’apprécier votre si rare mérite. Ils n’ont pas moins le désir de vous connaître personnellement que celui de voir vos ouvrages. Si je ne me rapellais votre bonté, je n’oseries vous demander de vos moments précieux pour lire une lettre que j’aimerais rendre plus intéressante, et accorder quelques instants à mes compatriotes qui seront bien reconnaissants de votre complaisance.
J’espere Monsieur que votre santé est bonne, et qu’elle vous permet toujours de faire des ouvrages qui ne peuvent qu’ajouter à votre réputation Européenne; ce qu’il y a de certain c’est qu’il est bien difficile d’arriver dans les arts à un point plus elevé que celui ou votre talent vous a placé.
Je voudrais beaucoup pouvoir retourner à Rome, qui est toujours la ville des arts; mais auparavant j’ai le désir de faire ici un tableau: j’aimerais bien avoir vos bons conseils; je suis privé ici de toute espece de ressource, et je crains pour ce motif que ce que je viens y faire ne reussisse pas: Mais la nature est belle et elle peut inspirer.
Veuillez Monsieur me conserver un souvenir bienveillant, et me croire avec la considération la plus distinguée votre très humble et obeissant serviteur
Leopold Robert
Venise ce 10 Mars 1832.