Monsieur le Conseiller d’Etat,
J’ai très-souvent desiré, en qualité de compatriote, d’avoir une occasion de Vous temoigner ma sincère admiration et la joÿe de voir un Scandinave ramener en Italie le veritable gout de la sculpture antique. Ce sera la plus belle page de ma Géographie Universelle que celle où je pourrois dire que les Dieux de Rome ou plutot de la Grece sont ressuscités par le ciseau d’un enfant d’Odin. Au milieu de beaucoup de souffrances, je n’ai de momen[t]s heureux que ceux ou je me transporte en pensée dans cet Elysée ou peut etre je serois jugé digne de Vous rencontrer, car mes moyens ne me permettront que difficilement d’aller ni à Rome ni à Copenhague où (comme peut etre Vous le savez) notre Roi m’a permis de retourner.
Aujourd’hui, un jeune Francais, M. Adolphe de Vergus, habile chimiste et botaniste, ami de mes amis et ami des beaux-arts, se rend à Rome et se charge de Vous porter ces lignes de ma part. Veuillez le recevoir avec ce noble sentiment d’humanité qui respire dans Vos ouvrages et veuillez lui permettre de visiter Votre riche attelier; il est digne d’en admirer les trésors.
Je parle souvent de Vous avec M. Cortot, sculpteur francais très distingué et qui, par son caractère simple et modeste, est presqu’un Danois. Il me prie de Vous saluer amicalement.
Excusez si je ne Vous écris pas plus longuement. Toujours occupé, il ne me reste que le tem[p]s pour Vous reiterer que Vous n’avez pas à Paris d’homme plus devoué à Votre gloire que Votre serviteur et compatriote
Malte Brun