Monsieur
Les Passions humaines ont toujours nourri les beaux arts. Je ne sais pas si le desespoir d’une vielle Mére et d’une jeune soeur de voir un charmant objet se perdre tout d’un Coup comme par phrenesie, je ne sais pas si c’est digne de vôtre divine ciselure, mais je voudrois perpetuer mes malheurs maternels que je crois pour plusieurs raisons, sans exemple. Je voudrois un bassorilievo du petit Temple dont vous voyez la description dans ces Feuilles avec une Inscription en Lettres antiques sur la Façade Alla Felicità passata. – Je voudrois au milieu un Tombeau & 2 figures femelles la Mère et la Soeur en genoux et dans l’attitude du desespoir priant à côté et la Harpe &c que j’ai depeint. Je ne suis pas decidée encore si je veux faire mettre au coté du Tombeau infelice innocente, on pourront les mettre àprès. Monsieur si vous ne pourrez pas vous même, daignez demander à quelque autre sculpteur d’un gout chaste et classique, un beau dessin, que je ferai payer de la manière indiquée tout de suite et je désire en même tems savoir ce qui serait la depense et combien de tems il faudroit pour executer cet ouvrage.
Ce seroit un grand plaisir pour moi si vous pourriez me rendre ce service vous même, mais au moins je suis sure que vous me mettriez en de bonnes mains.
Monsieur le Malheur est sacré et reservé et n’aime pas le bruit public Vous voulez bien donc ne pas dire que vous ayez reçu cette Lettre d’une si malheureuse Mère que
La Baronne de Rothman
Rome ce 4 Juillet.
1825
Je voudrois le dessin du Temple un peu architecturale, assez pour servir de dessin aux mediocres architectes de ce pays ci.